ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)
7 juin 2022 (*)
« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »
Dans l’affaire C-194/22 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 4 mars 2022,
Magic Box Int. Toys SLU, établie à Sant Cugat del Vallés (Espagne), représentée par Me J. L. Rivas Zurdo, abogado,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant :
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),
partie défenderesse en première instance,
KMA Concepts Ltd., établie à Mahé (Seychelles),
partie intervenante en première instance,
LA COUR (chambre d’admission des pourvois),
composée de M. L. Bay Larsen, vice-président de la Cour, M. S. Rodin et Mme O. Spineanu-Matei (rapporteure), juges,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la proposition de la juge rapporteure et l’avocate générale, Mme J. Kokott , entendue,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son pourvoi, Magic Box Int. Toys SLU demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 21 décembre 2021, Magic Box Int. Toys/EUIPO – KMA Concepts (SUPERZINGS) (T-549/20, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:935), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 29 juin 2020 (affaire R 2511/2019-4), relative à une procédure de nullité entre KMA Concepts Ltd. et Magic Box Int. Toys.
Sur la demande d’admission du pourvoi
2 En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.
3 Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.
4 Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.
5 Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.
6 À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante fait valoir que les deux moyens de son pourvoi soulèvent des questions importantes pour l’unité, la cohérence et le développement du droit de l’Union.
7 Par son premier moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) nº 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1), lors de l’appréciation de la similitude des signes en conflit.
8 Premièrement, la requérante soutient que le Tribunal a procédé à une appréciation erronée de la marque antérieure, en attribuant, aux points 30 et 41 de l’arrêt attaqué, un rôle dominant à l’élément verbal « zing », en dépit du fait que les éléments figuratifs, contrairement à ce qui ressort des points 28, 29 et 45 dudit arrêt, dominent bien l’impression d’ensemble produite par la marque antérieure. Selon elle, le Tribunal a méconnu la jurisprudence en vertu de laquelle l’appréciation d’un signe doit se faire selon l’impression d’ensemble produite par celui-ci (arrêt du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C-342/97, EU:C:1999:323, points 25 et 27) et en prenant en considération la totalité des éléments du signe en cause (arrêt du 12 novembre 2015, CEDC International/OHMI – Fabryka Wódek Polmos Łańcut (WISENT), T-449/13, non publié, EU:T:2015:839, point 86).
9 Deuxièmement, la requérante fait valoir que le Tribunal a, au point 46 de l’arrêt attaqué, erronément appliqué la jurisprudence reconnaissant la similitude sur le plan visuel entre une marque figurative comportant des éléments verbaux et une marque verbale, à condition que l’élément verbal du signe figuratif ne soit pas hautement stylisé, en faisant référence, notamment, à l’arrêt du 9 septembre 2019, SLL Service/EUIPO – Elfa International (LUMIN8) (T-680/18, non publié, EU:T:2019:565, point 32). Or, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal n’aurait pas tenu compte du fait que la marque antérieure serait hautement stylisée.
10 Troisièmement, la requérante fait grief au Tribunal d’avoir appliqué de manière erronée le droit de l’Union lors de l’appréciation du caractère distinctif de la marque. Plus précisément, elle reproche au Tribunal d’avoir jugé, aux points 33 et 43 de l’arrêt attaqué, que l’élément verbal « super » était laudatif et dépourvu de caractère distinctif, sans prendre en considération sa position au début de la marque contestée et l’incidence qu’aurait la prononciation dudit terme sur la comparaison phonétique des signes en cause.
11 La requérante précise enfin que les questions soulevées par ce premier moyen sont importantes pour l’unité et la cohérence du droit de l’Union en ce qu’un arrêt de la Cour permettrait d’établir des critères et des règles claires quant à l’appréciation du risque de confusion en présence d’une marque comportant des éléments figuratifs.
12 Par son second moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir dénaturé des faits, en ce qu’il aurait établi, au point 56 de l’arrêt attaqué, que celle-ci n’avait pas contesté le caractère distinctif intrinsèque normal de la marque antérieure. Or, si la requérante partage l’appréciation du caractère distinctif normal de la marque antérieure quant à son élément verbal, elle soutient avoir fondé son recours sur le fait que la différence entre les marques en cause résulte, en substance, du caractère distinctif intrinsèque élevé de l’élément figuratif de la marque antérieure.
13 À titre liminaire, il convient de relever que c’est au requérant qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 20 et jurisprudence citée).
14 En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut tend à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (voir, en ce sens, ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21 et jurisprudence citée).
15 Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière claire les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi. Lorsque l’erreur de droit invoquée résulte de la méconnaissance de la jurisprudence, la demande d’admission du pourvoi doit exposer, de façon succincte mais claire et précise, premièrement, où se situe la contradiction alléguée, en identifiant tant les points de l’arrêt ou de l’ordonnance sous pourvoi que le requérant met en cause que ceux de la décision de la Cour ou du Tribunal qui auraient été méconnus, et, deuxièmement, les raisons concrètes pour lesquelles une telle contradiction soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22 et jurisprudence citée).
16 En effet, une demande d’admission ne contenant pas les éléments énoncés au point précédent de la présente ordonnance ne saurait, d’emblée, être susceptible de démontrer que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union justifiant son admission (ordonnances du 24 octobre 2019, Porsche/EUIPO, C-613/19 P, EU:C:2019:905, point 16, et du 24 février 2022, Sony Interactive Entertainment Europe/EUIPO, C-678/21 P, non publiée, EU:C:2022:141, point 17).
17 S’agissant, en premier lieu, de l’argumentation résumée aux points 7 à 11 de la présente ordonnance, il convient de constater qu’une argumentation fondée sur la méconnaissance par le Tribunal de sa propre jurisprudence et de celle de la Cour n’est pas, en soi, suffisante pour établir, conformément à la charge de la preuve qui pèse sur l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi, que ce pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union. En effet, le demandeur doit respecter, à cette fin, l’ensemble des exigences énoncées au point 15 de la présente ordonnance. Or, en l’occurrence, la requérante ne fournit aucune indication sur la similitude des situations visées dans la jurisprudence qui aurait été méconnue permettant d’établir la réalité de la contradiction invoquée (voir, en ce sens, ordonnance du 22 février 2022, Sony Interactive Entertainment Europe/EUIPO, C-679/21 P, non publiée, EU:C:2022:109, point 17 et jurisprudence citée).
18 En outre, si la requérante allègue que son pourvoi soulève une question susceptible de se poser dans toutes les affaires relatives à l’appréciation du risque de confusion entre marques comportant des éléments figuratifs, force est de constater qu’il s’agit d’un argument d’ordre général qui, par conséquent, ne respecte pas les exigences rappelées au point 15 de la présente ordonnance.
19 En second lieu, s’agissant de l’argumentation évoquée au point 12 de la présente ordonnance, fondée sur une prétendue dénaturation des faits commise par le Tribunal, il convient de relever qu’une telle argumentation ne saurait, en principe, être susceptible, en tant que telle et même à la supposer fondée, de soulever une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (voir, en ce sens, ordonnance du 10 novembre 2021, Comercializadora Eloro/EUIPO, C-415/21 P, non publiée, EU:C:2021:924, point 21 et jurisprudence citée).
20 Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.
21 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.
Sur les dépens
22 Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.
23 La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié aux autres parties à la procédure et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :
1) Le pourvoi n’est pas admis.
2) Magic Box Int. Toys SLU supporte ses propres dépens.
Signatures
* Langue de procédure : l’espagnol.