ORDONNANCE DE LA COUR (chambre d’admission des pourvois)
15 juillet 2022 (*)
« Pourvoi – Marque de l’Union européenne – Admission des pourvois – Article 170 ter du règlement de procédure de la Cour – Demande ne démontrant pas l’importance d’une question pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union – Non-admission du pourvoi »
Dans l’affaire C-233/22 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 4 avril 2022,
Meta Cluster GmbH, établie à Pyrbaum (Allemagne), représentée par Me H. Baumann, Rechtsanwalt,
partie requérante,
l’autre partie à la procédure étant :
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),
partie défenderesse en première instance,
LA COUR (chambre d’admission des pourvois)
composée de M. L. Bay Larsen, vice-président de la Cour, MM. N. Jääskinen et M. Safjan (rapporteur), juges,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la proposition du juge rapporteur et l’avocat général, M. M. Campos Sánchez-Bordona, entendu,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son pourvoi, Meta Cluster GmbH demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 26 janvier 2022, Meta Cluster/EUIPO (Clustermedizin) (T-233/21, non publié, EU:T:2022:27), par lequel celui-ci a rejeté son recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 22 février 2021 (affaire R 2127/2020-4), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal Clustermedizin comme marque de l’Union européenne.
Sur la demande d’admission du pourvoi
2 En vertu de l’article 58 bis, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, l’examen des pourvois formés contre les décisions du Tribunal portant sur une décision d’une chambre de recours indépendante de l’EUIPO est subordonné à leur admission préalable par la Cour.
3 Conformément à l’article 58 bis, troisième alinéa, de ce statut, le pourvoi est admis, en tout ou en partie, selon les modalités précisées dans le règlement de procédure de la Cour, lorsqu’il soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.
4 Aux termes de l’article 170 bis, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, dans les situations visées à l’article 58 bis, premier alinéa, dudit statut, la partie requérante annexe à sa requête une demande d’admission du pourvoi dans laquelle elle expose la question importante que soulève le pourvoi pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et qui contient tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur cette demande.
5 Conformément à l’article 170 ter, paragraphes 1 et 3, dudit règlement, la Cour statue sur la demande d’admission du pourvoi dans les meilleurs délais par voie d’ordonnance motivée.
6 À l’appui de sa demande d’admission du pourvoi, la requérante fait valoir que celui-ci soulève la question de savoir si le Tribunal peut rejeter la demande d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), lorsque, selon les faits exposés par le demandeur de la marque, l’application de ces dispositions est exclue en vertu de l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement, parce que la marque a acquis un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait, mais que le demandeur n’a pas expressément invoqué cette dernière disposition.
7 La requérante soutient que cette question est importante pour l’unité, la cohérence et le développement du droit de l’Union dans la mesure où le fait d’admettre que le demandeur de la marque doit non seulement exposer les faits au soutien d’une disposition qui lui est favorable, mais également invoquer celle-ci expressément, serait incompatible avec le droit à un procès équitable garanti par l’article 47, deuxième alinéa, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »).
8 En outre, ladite question serait importante parce que l’omission du Tribunal de communiquer certaines informations serait susceptible de porter atteinte au droit du demandeur de la marque, consacré à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, d’être entendu avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise contre lui.
9 Par ailleurs, la requérante fait valoir l’importance de la question pour le développement du droit de l’Union, puisque la Cour n’a pas encore eu l’opportunité de préciser expressément que le caractère distinctif d’un signe acquis par l’usage, en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement 2017/1001, est protégé, en vertu de l’article 17, paragraphe 2, de la Charte, en tant que propriété intellectuelle.
10 À titre liminaire, il convient de rappeler que c’est à la requérante qu’il incombe de démontrer que les questions soulevées par son pourvoi sont importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, point 20 et jurisprudence citée).
11 En outre, ainsi qu’il ressort de l’article 58 bis, troisième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 170 bis, paragraphe 1, et l’article 170 ter, paragraphe 4, du règlement de procédure, la demande d’admission du pourvoi doit contenir tous les éléments nécessaires pour permettre à la Cour de statuer sur l’admission du pourvoi et de déterminer, en cas d’admission partielle de ce dernier, les moyens ou les branches du pourvoi sur lesquels le mémoire en réponse doit porter. En effet, étant donné que le mécanisme d’admission préalable des pourvois visé à l’article 58 bis de ce statut vise à limiter le contrôle de la Cour aux questions revêtant une importance pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union, seuls les moyens soulevant de telles questions et établis par le requérant doivent être examinés par la Cour dans le cadre du pourvoi (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 21 et jurisprudence citée).
12 Ainsi, une demande d’admission du pourvoi doit, en tout état de cause, énoncer de façon claire et précise les moyens sur lesquels le pourvoi est fondé, identifier avec la même précision et la même clarté la question de droit soulevée par chaque moyen, préciser si cette question est importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union et exposer de manière spécifique les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard du critère invoqué. En ce qui concerne, en particulier, les moyens du pourvoi, la demande d’admission du pourvoi doit préciser la disposition du droit de l’Union ou la jurisprudence qui aurait été méconnue par l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi, exposer de manière succincte en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal et indiquer dans quelle mesure cette erreur a exercé une influence sur le résultat de l’arrêt ou l’ordonnance sous pourvoi (ordonnance du 10 décembre 2021, EUIPO/The KaiKai Company Jaeger Wichmann, C-382/21 P, EU:C:2021:1050, point 22 et jurisprudence citée).
13 En l’occurrence, s’agissant, d’une part, des arguments figurant aux points 7 et 8 de la présente ordonnance, tirés de la violation de l’article 47, deuxième alinéa, et de l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la Charte, il y a lieu de relever, sans préjudice de la place importante qu’occupent, au sein de l’ordre juridique de l’Union, le droit à un procès équitable et le droit d’être entendu, qu’ils ne répondent pas aux exigences énoncées au point 12 de la présente ordonnance. En effet, la requérante se limite à énoncer les erreurs prétendument commises par le Tribunal, sans aucunement exposer les raisons pour lesquelles ces erreurs, à les supposer établies, soulèveraient des questions importantes pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.
14 D’autre part, en ce qui concerne l’argument exposé au point 9 de la présente ordonnance, il suffit de rappeler que le fait qu’une question de droit n’a pas fait l’objet d’un examen par la Cour ne signifie pas pour autant que cette question revêt nécessairement une importance pour le développement du droit de l’Union, l’auteur d’une demande d’admission d’un pourvoi étant toujours tenu de démontrer une telle importance en fournissant des indications précises non seulement sur le caractère de nouveauté de cette question, mais également sur les raisons pour lesquelles ladite question est importante au regard d’un tel développement (voir, en ce sens, ordonnance du 24 février 2022, Sony Interactive Entertainment Europe/EUIPO, C-678/21 P, non publiée, EU:C:2022:141, point 23 et jurisprudence citée). Or, une telle démonstration ne ressort pas de la présente demande, la requérante se bornant à affirmer, de manière générique, que la Cour ne s’est pas encore exprimée expressément sur la question concernée.
15 Dans ces conditions, il convient de constater que la demande présentée par la requérante n’est pas de nature à établir que le pourvoi soulève une question importante pour l’unité, la cohérence ou le développement du droit de l’Union.
16 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de ne pas admettre le pourvoi.
Sur les dépens
17 Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.
18 La présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi n’ait été signifié à l’autre partie à la procédure et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il convient de décider que la requérante supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (chambre d’admission des pourvois) ordonne :
1) Le pourvoi n’est pas admis.
2) Meta Cluster GmbH supporte ses propres dépens.
Signatures
* Langue de procédure : l’allemand.